Guillaume Poitrinal : « La Fondation du Patrimoine est déjà intervenue dans plus d’une commune sur deux en France »
Visioconférence le 29 mars 2021
L’incendie de Notre-Dame a mis en lumière la Fondation du Patrimoine, qui a recueilli les deux tiers des fonds collectés : c’est le plus grand mouvement de philanthropie jamais connu. Mais la Fondation organise actuellement 1700 collectes sur son site Internet pour restaurer un patrimoine non classé certes moins prestigieux, mais qui contribue à la fierté locale et à l’attractivité du territoire. Guillaume Poitrinal, président de la Fondation du Patrimoine, nous présente ses actions et ses enjeux actuels.
La Fondation du Patrimoine a sauvé le magnifique théâtre à l’italienne de ma ville natale, Châtellerault, qui était resté fermé pendant 15 ans. C’est ainsi que j’ai découvert cette formidable institution, créée par Jacque Chirac en 1996. Auparavant, aucune institution ne prenait en charge le patrimoine vernaculaire, non classé, de nos campagnes.
Les fondateurs sont des grandes entreprises du CAC40 ; la Fondation rassemble 70 salariés et un réseau de 700 bénévoles à travers toute la France. Bien que de caractère privé, ses statuts sont inscrits dans une loi de 1996.
Deux modes d’action
- Délivrer des labels pour que les propriétaires puissent déduire de leurs impôts les travaux qu’ils réalisent sur des monuments non classés d’intérêt patrimonial.
- Organiser des collectes de fonds : 1700 collectes pour le patrimoine sont ouvertes sur le site de la Fondation, notamment pour restaurer des églises que les maires n’ont plus les moyens d’entretenir. Nous menons ces collectes en partenariat avec de petites associations ou fondations qui nous demandent de l’aide. La fondation du Patrimoine participe et attire d’autres donateurs, publics et privés.
Les bâtiments à restaurer sont des églises, moulins, théâtres, ponts, vieilles locomotives, vieux avions, maisons d’auteurs (Victor Hugo à Guernesey)…, ainsi que le patrimoine naturel, le patrimoine industriel.
Nous sauvons 120 bâtiments par an mais recevons 3000 dossiers : les besoins sont énormes.
Nos enjeux actuels
- Recruter des bénévoles : la Fondation est déjà intervenue dans plus d’une commune sur deux en France. Les bénévoles de terrain sont essentiels, qui montent une association pour sauver un patrimoine local et bénéficient de l’aide de la fondation du Patrimoine pour y parvenir. Nous cherchons actuellement des bénévoles plutôt féminins et en activité pour diversifier les profils. Il faut savoir que le National Trust en Angleterre, équivalent de la fondation du Patrimoine, rassemble 30 000 bénévoles.
- Etre plus présents sur le numérique, les réseaux sociaux.
Un budget en forte croissance
Le budget de la fondation s’élevait à 30 millions € en 2017. Je me suis donné pour objectif de doubler ce budget en 4 ans. La fondation est affectataire des successions en déshérence, qui sont en diminution. Nous recevons des legs, donations, mécénats d’entreprise. Nos ressources ont été diversifiées : le loto du Patrimoine est un tirage supplémentaire du loto, qui fonctionne bien, ainsi que des jeux de grattage. Un projet par département et un projet par région chaque année bénéficient chaque année de ce loto.
La collecte après l’incendie de Notre-Dame nous a permis de progresser. Nous pouvons être plus efficaces dans la gestion des collectes et la fidélisation des donateurs. Les dons que nous recevons s’étendent de 50 centimes à 100 millions €. Mais la crise sanitaire à réduit de 20 % notre en 2020.
Guillaume Poitrinal est chef d’entreprise. Il a débuté sa carrière chez Morgan Stanley avant de rejoindre Unibail-Rodemco qu’il dirige de 2005 à 2013. Il démissionne pour créer Woodeum puis WO2, deux promoteurs immobiliers spécialisés dans la construction bas carbone et le bois. Dans le même temps il lance le fonds d’investissement ICAMAP, spécialisé dans l’immobilier bas carbone. Il est président de la Fondation du patrimoine depuis 2017 ; son mandat vient d’être renouvelé pour 4 ans.
A quoi sert la Fondation du Patrimoine ?
Quelle place donnez-vous à l’inclusion sociale dans les projets de restauration du patrimoine ?
Je crois à la collaboration public-privé : les DRAC (Directions régionales de l’Action culturelle) nous apportent beaucoup de dossiers. Le secteur public ne veut pas intervenir sur des bâtiments privés, dont la restauration bénéficie à un individu ou à une entreprise. Il faut se prendre en mains et arrêter de tout attendre de l’Etat ! Le sujet du patrimoine s’y prête bien.